6.1.7 Mgr Paul Guérin : « Les Petits Bollandistes - Vies des Saints » (1876)

Les vies de l’ensemble des disciples de Notre Seigneur Jésus ayant évangélisé les Gaules, figurent intégralement dans cette œuvre magistrale de référence, qu’est la vie des saints présentée par les « Petits Bollandistes ». Je ne fais apparaître, pour cette section, que les extraits de la vie de Marie-Madeleine et de sa sœur Marthe.
Vous trouverez les textes de l’œuvre relatifs à l’apostolat des autres apôtres, aux sections qui leur sont respectivement consacrées.

6.1.7.1 Sainte Marie-Madeleine

Du tome 8, pages 591 à 595 :

« […] Saint Luc, aux Actes des Apôtres, chapitre 8, dit qu’après le martyre de Saint Etienne, la persécution des Juifs fut si violente dans la ville Jérusalem, que tous les fidèles, excepté les Apôtres, en sortirent et se retirèrent dans les villes de Judé et de Samarie : cela nous porte à croire qu’alors Lazare, Marthe et Madeleine, allèrent passer quelques temps en Galilée : car, nous l’avons déjà remarqué, leur parents leur avaient laissé de grands biens, à moins qu’ils n’eussent vendus leurs héritages pour en apporter le prix au pieds des Apôtres et ne plus vivre que des biens communs de l’Eglise ; dans ce cas, ne possédant plus rien en propre ils eussent été indifférents pour toute sorte de lieux et de demeures.

Lorsque le torrent de cette première persécution fut passé, ils revinrent à Jérusalem et probablement y demeurêrent jusqu’à la seconde persécution, vers l’année 45. Ce fut en ce temps-là que les Apôtres se disperssèrent dans le monde, que Saint Pierre partit pour Rome, que la Sainte Vierge fut conduite par Saint Jean à Ephèse, et que l’Evangile commença à se répandre par toute la terre. Les Grecs veulent que Madeleine soit morte et enterrée à Ephèse [ce qui est absolument erroné Cf. § 6.1.9 « La tradition et la critique »] ; on peut leur accorder qu’elle fit un voyage et y demeura quelques temps avec la Sainte Vierge ; mais, étant retournée en Judée, elle ne put éviter pour cette fois la fureur des Juifs, qui la haïssent d’autant plus qu’elle avait été plus affectionnée à Notre-Seigneur, et que la vie de Lazare, son frère, était un reproche continuel de leur opiniâtreté et de leur malice. Elle fut donc saisie avec le même Lazare et avec Sainte Marthe sa sœur, et Sainte Marcelle, que l’on croit avoir été suivante de Sainte Marthe, et, selon l’ancienne tradition approuvée par le Saint-Siège et confirmée par le témoignage d’une infinité de graves auteurs anciens et modernes, ces barbares la mirent avec toute sa compagnie sur la mer Méditerranée, dans un mauvais vaisseau dépouillé de toutes les choses nécessaires à la navigation, afin qu’ils périssent tous dans les eaux. Saint Maximin, l’un des soixante-douze disciples de Notre-Seigneur, qui les avait baptisés ; Sidoine, que l’on tient être l’aveugle-né dont il est parlé dans l’Evangile, et beuacoup d’autres, entre lesquels les Anglais mettent aussi Saint Joseph d’Arimathie, comme nous l’avons remarqué dans sa vie, furent exposés au même péril.

Jamais vaisseau ne parut en plus grand danger de naufrage. Les Juifs ne croyaient pas qu’il pût monter jusqu’en haute mer, et ils espéraient le voir périr devant leurs yeux avec sa charge ; mais jamais vaisseau ne fut mieux conduit et ne fit une plus heureuse navigation. Il n’avait ni voiles, ni rames, ni gouvernail, ni pilote, mais les flots le conduisaient d’eux-mêmes et lui servaient de toutes choses ; il passa sans accident des grandes mers qui s’étendent depuis la Palestine jusqu’en Sicile, et depuis la Sicile jusqu’en Provence, et, ce qui est inouï, il vogua tout d’une traite et ne prit jamais port en chemin ; enfin, il arriva à Marseille, qui était dès lors un des principaux ports et l’une des plus célèbres villes de Gaules. On ne put le voir arriver sans étonnement et sans admiration. Un si grand miracle fit considérer ces exilés comme des personnes extraordinnaires et dont le ciel prenaît une protection singulière : on les reçut avec honneur, on les écouta avec plaisir, on les assista avec satisfaction et libéralité. Ils se servirent avantageusement d’un accueil si favorable pour annoncer à ce peuple idolâtres les vérités augustes du Christianisme, et leur prédication ne fut pas inutile : ils eurent bientôt la consolation de moissonner ce qu’ils avaient semé, c'est-à-dire de voir la semence de l’Evangile porter des fruits en abondance, puisque les « Actes des Saints de l’Eglise de Toulon », qui doivent être anciens de quinze cents ans, ont été composés pas les soins de Didier, évêque de ce siège, assurent qu’ils convertirent toute la Provence à la foi de Jésus-Christ.

Saint Maximin fut évêque d’Aix. Saint Lazare se chargea de l’église de Marseille. Sainte Marthe assembla dans Tarascon une communauté de saintes vierges dont elle fut la mère et la maîtresse, comme nous le dirons dans sa vie. Pour Madeleine, qui était accoutumée à la vie contemplative et qui aimait à demeurer paisible aux pieds du Fils de Dieu, après avoir si utilement travaillé à la conversion des Marseillais, elle choisit pour elle le désert et la solitude. On montre dans l’église de Saint-Victor de Marseille, une grotte où on dit qu’elle passait les nuits en oraison, tandis même qu’elle s’occupait au salut des âmes. On en montre une autre à deux milles de la même ville, en un lieu appelé Aigulades, où elle fit sa première retraite. Mais ces lieux n’étant pas encore assez solitaires pour elle, parce qu’elle y était quelquefois interrompue par les personnes qui venaient implorer son secours, elle se retira sur une haute montagne extrêmement déserte, entre Aix, Marseille et Toulon ; ayant trouvé un roc fort escarpé, et une caverne au milieu, elle y choisi sa demeure pour le reste de ses jours. Le temps qu’elle y demeura fut encore long, et l’on dit qu’il égala les années de la vie cachée du Fils de Dieu. Sa vie y fut toute miraculeuse et plus angélique qu’humaine. La parole de Dieu, la contemplation de ses grandeurs, la méditation des mystères de Jésus-Christ et les larmes de la pénitence étaient tout son pain et toute sa nourriture.

On voit dans le milieu de cette caverne un roc élevé en forme de tombeau, sur lequel il dégoutte point d’eau, au lieu qu’il en dégoutte par tout le reste de la caverne : on dit que c’était là qu’elle passait les jours les nuits en prières, tantôt à genoux, tantôt couchée sur le côté, comme elle y est représentée par  une belle figure de sa taille, laquelle est très ancienne et que la tradition porte avoir été mise par Maximin. Cependant elle arriva à une si grande sainteté et une si parfaite ressemblance avec les esprits célestes, que ces bienheureuses intelligences l’élevaient tous jours sept fois au-dessus da sa grotte et la montaient jusque sur la pointe de la montagne, qui surpasse encore en hauteur cette caverne de plusieurs coudées. Là, au-dessus de la terre, elle contemplait le ciel à découvert et y portait continuellement ses désirs pour se réunir à Jésus-Christ, son trésor et son bien-aimé. Les habitants d’alentour appellent le lieu de la caverne la « Sainte-Baume », parce que « baume », en leur langue, signifie « montagne » [plutôt « grotte »] ; et pour cette pointe de rocher, ils l’appelent le Saint-Pilon. On a, dans la suite, facilité la montée de l’une et de l’autre par des degrés que l’on y a taillés en tournant, et la dévotion d’une infinité de pèlerins, qui y abordent à tous moments, a fait que l’on a bâti, à la Sainte-Baume, un petit couvent soutenu sur une bosse de la montagne.

Ce monastère, qui était autrefois aux bénédictins de Saint-Victor de Marseille, a depuis été donné aux religieux de l’Ordre de Saint-Dominique pour l’acquit des fondations, la célébration des divins offices et l’assistance spirituelle des personnes qui viennent faire leurs dévotions ; cette grotte est maintenant remplie d’autels et incrustée de marbres en plusieurs endroits. Il y a aussi dans l’avenue une hôtellerie, mais on n’y mange jamais de chair ; ces que les plus grands princes et nos rois même ont observé inviolablement. Pour le Saint-Pilon, où l’on voit encore les vestiges des pieds de notre Sainte imprimés sur le roc, on y a bâti une fort belle chapelle, comme un monument perpétuel des grâces que cette heureuse pénitente y recevait tous les jours dans ses ravissements prodigieux et ses communications intimes et familières avec son Seigneur et son Dieu (Nous n’avons rien changé en cet endroit au récit du P. Giry : c’est un trop précieux témoignage de ce qui existait alors à la Sainte Baume).

Lorsqu’elle eut passé trente ans dans cette affreuse solitude, sans aucun commerce avec les hommes, l’heure de sa récompense étant venue, les anges, qui avaient coutume de l’élever sur le Saint-Pilon, la transportèrent en la ville d’Aix, dans l’oratoire que Saint Maximin, assisté des nouveaux chrétiens, y avait déjà fait bâtir. Là, toute baignée des larmes que son amour et sa joie lui faisaient répandre, elle demanda à ce bienheureux évêque le corps admirable du Fils de Dieu, comme le viatique salutaire du voyage qu’elle allait faire à la ville éternelle. La splendeur de son visage et l’élévation de son corps de deux coudées au-dessus de la terre surprirent d’abord le saint prélat et le remplirent de tant de respect qu’il n’osait presque s’approcher d’elle ; mais elle l’encouragea, lui disant qu’elle était la pécheresse Madeleine qui était venue avec lui à Marseille, et que Dieu avait conservée jusqu’à ce temps dans le secret du désert, pour lui donner plus le temps de faire pénitence. Ainsi, parès quelques prières, il la communia et lui donna sa bénédiction. Quelques auteurs disent qu’elle fut ensuite reportée par les anges dans sa grotte de la Sainte-Baume, où elle mourut. Mais d’autres, comme Saint Vincent de Beauvais, Saint Antonin, Pierre de Natalibus et Sylvestre de Priero, disent qu’elle expira dans l’oratoire même où elle reçut le corps de son Sauveur, et en présence de tout le clergé ; ce qui lui fit revoir pour l’éternité Celui qu’elle avait aimé si tendrement et recherché avec tant d’ardeur.

Son corps, qui exhalait une odeur merveilleuse, fut porté par les prêtres de l’église d’Aix à un bourg appelé « Villa lata », où Saint Maximin avait déjà fait construire une chapelle, et qui, depuis, a changé de nom et a pris celui de Saint-Maximin. C’est là qu’elle fut ensevelie dans un sépulcre d’albâtre, en mémoire de cet autre albâtre où deux fois la Sainte avait renfermé le parfum dont elle oignit le Sauveur.

On représente ordinairement Sainte Madeleine à genoux devant une croix, au pied de laquelle est une tête de mort [pour signifier la mortification qu’elle s’imposa]. D’autres fois elle est debout, tenant à la main un vase de parfums ».

Culte et reliques

« Les précieuses dépouilles de cette sainte amante et pénitente ont de tous temps été honorés à Saint-Maximin, mais principalement depuis que Charles II, prince de Salerne et ensuite roi de Naples, de Sicile, de Jérusalem et de Hongrie, y a fait bâtir, sur la fin du 13 ième siècle, le célèbre couvent de l’Ordre de Saint-Dominique, un des plus magnifiques monastères de France. On voit, au-dessus du grand autel, un tombeau de porphyre, présent du pape Urbain VIII, où l’an 1660, les principaux ossements qui étaient dans la sépulture furent transférés en présence de Louis XIV et de toute sa cour, par Jean-Baptiste de Marinis, archevêque d’Avignon, du même Ordre de Saint-Dominique : et, dans un petit caveau qui est dans la nef, on voit le précieux chef de la Sainte, sur le front duquel il paraît encore un peu de sa chair, à l’endroit où l’on croit que Notre-Seigneur la toucha après sa résurrection, en lui disant : Noli me tangere. Il y a, au même, une touffe de ses cheveux ; et dans sa chapelle, qui est à l’opposite, un ossement de ses bras qui, sans aucune cause naturelle, exhale une odeur très-douce et très agréable, à peu près comme le vrai bois de Sainte-Lucie.

Les Grecs, dans leur ménologe, ainsi que les hitoriens Cédrénus, Jean Curopalat et Zonare, disent que les reliques de Sainte Madeleine, étant à Ephèse avec celles de Saint Lazare, furent transportées à Constantinople, l’an 886, par le commandement de l’empereur Léon, ce qui est conforme à ce que dit Saint Grégoire de Tours au livre 1 er des « Miracles », chapitre 30, que, de son temps, elles étaient à Ephèse, n’avait point de couverture au dessus ; et encore à ce que dit Richard de Vassebourg, au livre 2 des « Antiquités de la Gaule-Belgique », que Saint Magdalvée, évêque de Verdun, étant allé à Ephèse, dans son pèlerinage de la Terre Sainte, on lui donna deux dents et un peu des cheveux de Sainte Madeleine. Mais cette Madeleine, dont parle les Grecs et ceux qui les ont suivis, n’est pas notre Sainte pénitente, disciple de Jésus-Christ, mais quelque autre du même nom, qu’ils ont confondue avec elle : cette Madeleine, d’après certains auteurs, était une vierge et une martyre.

Sigebert, dans sa « Chronique » sur l’année 745, dit que les Sarrasins ayant saccagé la Provence, le corps de Sainte Madeleine fut transporté par Girault, conte de Bourgogne, au monastère de Vézelay, que lui-même avait fait bâtir : ce que plusieurs autres auteurs ont écrit après lui ; mais , outre que Sigebert ne parle qu’en doutant, la tradition des Eglises de Provence est bien plus certaine, puisque, en 1279, on trouva à Saint-Maximin, dans un lieu fort secret, un sépulcre de marbre dans lequel le corps de Sainte Marie-Madeleine avait été caché par crainte des Sarrasins, avec deux inscriptions très-anciennes et dont même l’une était écrite sur des tables enduites de cire, lesquelles portaient son nom, avec le sujet qui obligea de cacher cegrand trésor. Si Girault, conte de Bourgogne, a fait tranférer un corps saint de Provence à Veselay, ce qui ne lui est pas difficile, étant seigneur d’Avignon, ce n’a pas été celui de Sainte Madeleine, mais de quelque autre saint ou sainte que l’on a pris pour elle.

Pendant la révolution française, l’église de la Sainte-Baume fut profanée et détruite. Celle de Saint-Maximin se vit aussi dépouillée de son trésor : le décemvir Barras fit changer la châsse en numéraire, et les saintes reliques furent jetées pèle-mêle. Cependant l’ancien sacristain laïque des Dominicains, Joseph Bastide, enleva secrètement le chef de Sainte Madeleine, la fiole de cristal dite la « Sainte-Ampoule » le « noli me tangere » avec sa boîte, uen partie des cheveux et des os du bras. L’Eglise de Saint-Maximin ne fut point incendiée et ruinée comme la Sainte-Baume, grâce à la sage prévoyance de Lucien Bonaparte, qui fit écrire sur la porte : « Fournitures militaires ». Dès que le calme commença à se rétablir, Bastide rendit à l’église de Saint-Maximin le chef de Sainte Madeleine : de plus, on trouva dans la sacristie les corps saints jetés pèle-mèle, comme nous l’avons dit ; on ne peut distinguer que deux ossements de Saint Maximin, le chef de Saint Sidoine et quelques autres, qui furent mis dans des châsses de bois. On renferma, dans un reliquaire de cuivre doré, en forme de bras, négligé par les spoliateurs, les deux ossements qui étaient dans l’ancienne châsse appelée les « Bras de Sainte Madeleine ».

Relevée de ses ruines en 1814, et visitée le 5 du même mois par vingt-cinq ou trente mille pèlerins, la Sainte Baume subit de nouvelles dévastations pendant les Cents-Jours. Le maréchal Brune, qualifié, dit-on, par Napoléon, « d’intrépide dépradateur », renouvela les horreurs, les impiétés de 93. Le 22 août suivant, il périt misérablement à Avignon, victime de la fureur politique du peuple ; son cadavre jeté à l’eau, partout où le Rhône le porta sur ses bords, fut rejeté dans son cours ; la Justice divine le priva d’une sépulture qu’on ne refuse pas aux inconnus. Depuis, la piété des Provençaux, la munificence de Louis XVIII, restaurèrent une seconde fois ce monument. Pie VII accorda de nouveau l’indulgence plénière à ceux qui visiteraient la grotte de Sainte Madeleine en quelqu’une des fêtes suivantes : celles de la Pentecôte, de Sainte Madeleine, de Saint Louis, de Saint Maximin et de l’Exaltation de la Sainte Croix ».

Au mois de mai 1822, tous les ouvrages d’art étant terminés, l’autel de Sainte Madeleine et celui de la Sainte Vierge entièrement remis à neuf, l’archevêque d’Aix bénit solennellement la grotte ; plus de quarante mille pèlerins y entrèrent successivement. Cela ne suffisait pas sans doute pour l’accomplissement de cette prédiction de la bouche du Sauveur, lorsque Madeleine eut répandu ses parfums sur l’Auteur de toute suavité : « En vérité, je vous le dis, partout où cet Evnagile sera prêché, on racontera, à la mémoire de cette femme, l’action qu’elle vient de faire ». Un édifice prodigieux s’éleva, dont napoléon voulut faire le temple de la Gloire ; en effet, il publie une gloire proclamée par le meilleur Juge, par Dieu lui-même : ce temple porte le nom de la « Madeleine ».
Ainsi, cette humble femme éclate dans ce foyer même de toute célébrité, dans ce Paris d’où la renommée rayonne sur le monde. Voilà le reliquaire que la Providence préparait pour les restes de Sainte Madeleine.

En 1781, par l’ordre de Louis XVI, on ouvrit, por la première fois, l’urne de porphyre où le corps de Sainte Madeleine était renfermé, et l’on en détacha une relique insigne, qui fut portée à Don Ferdinant, duc de Parme. Dieu prit à temps cette mesure. Douze ans plus tard, tout ce qu’il y avait dans l’urne fut dispersé : il ne resta plus d’autre relique insigne de Sainte Madeleine que la portion envoyée au duc de Parme et le chef honoré dans l’église de Saint-Maximin, avec deux ossements d’un bras.

La Providence voulut que Napoléon envoyât à Paris, parmi les dépouilles du duc de Parme qui devaient être converties en numéraire, la châsse même qui renfermait cette précieuse relique ; après la Restauration, ce trésor, cédé en toute prospérité par l’ancinne reine d’Etrurie, fut transféré dans le monument qui l’attendait d’après les décrets éternels ».              

6.1.7.2 Sainte Marthe

Du tome 9, pages 93 à 103 :

« Nous avons dans cette excellente vierge une disciple, une hôtesse et une épouse de Jésus-Christ : une disciple, parce qu’elle était une de ces saintes femmes qui, charmées de la douceur et de la sainteté de ses paroles, le suivaient ordinairement pour profiter de ses admirables instructions ; une hôtesse, parce qu’elle avait souvent en l’honneur de le receoir dans sa maison de Béthanie et de lui présenter à manger ; enfin une épouse, parce qu’ayant conservé toute sa vie la fleur de la virginité, elle est sans doute du nombre de celles qu’il honore particulièrement de la qualité de ses épouses. Sainte Marthe était fille de Théophile, Syrien de nation, et riche seigneur de Syrie, et d’Eucharis, noble juive, du sang royal d’Israël ; elle avait pour sœur utérine Sainte Marie Madeleine, et pour frère utérin Saint Lazare ; dans le partage de leurs biens, Marthe eut en particulier pour elle la maison de Béthanie ; et n’ayant nulle part au libertinage de sa sœur, qui s’oublia dans les commencements, elle se conserva dans l’innocence, dans la modestie et la pudeur, qui doivent être si chères aux personnes de son sexe. Elle se fût sans doute engagée dans les liens du mariage, si elle n’eût entendu de la bouche de Notre-Seigneur les excellents éloges qu’il donnait souvent à la virginité […].

Notre-Seigneur ayant un jour été invité à souper, dans Béthanie, Marthe fut celle qui servit à table : Martha ministrabat : ce qui montre que cette excellente fille avait une inclination particulière pour ces emplois, qui paraissent humiliants aux yeux des hommes, et se plaisait régulièrement à servir les autres. Baronius, en l’année 34 de ses Annales, écrit qu’elle était de ces pieuses femmes qui suivirent Jésus-Christ sur le Calvaire, le jour de sa Passion, et qui, étant allées le troisième jour à son tombeau, eurent le bohneur de le voir dans l’éta de sa Résurrection glorieuse. Il nous paraît aussi fort probable que ce bon Maître la visita quelquefois à Béthanie, durant les quarante jours qu’il demeura sur la terre avant son Ascension. Mais surtout nous avons remarqué, d’après Saint Luc, qu’il s »’y transporta et y mena même ses disciples, le jour qu’il voulut monter au ciel. De là, il est aisé de conclure que Marthe fut présente à cette dernière action de son grand voyage sur la terre, et qu’elle reçut alors sa dernière bénédiction extérieure et sensible, avec tous les disciples. On peut croire encore fort raisonnablement qu’elle accompagnait la Sainte Vierge dans le cénacle lorsque le Saint-Esprit, au jour de la Pentecôte, y descendit en forme de feu, et qu’il remplit tous les assistants, non-seulement de l’abondance de ses grâces, mais aussi de sa divine personne, et qu’ainsi elle eut part à cette inestimable faveur ; ou, si elle n’y était pas, elle reçut assurément le même don par l’imposition des mains des Apôtres, qui l’étendirent ensuite sur tous les disciples.

Il n’est point nécessaire de répéter ici ce qui lui arriva en Judée, après l’accomplissement de ces grands mystères. On peut voir, dans la vie de Sainte Madeleine, comment elle fut persécutée par les Juifs, et comment, après avoir souffert une infinité de traverses et d’embûches, elle fut enfin mise dans un vaiseau sans voiles, sans rames, sans pilote, sans provisions, pour périr misérablement au milieu de la mer. Mais Dieu, qui l’avait destinée à apporter les premiers rayons de la foi dans les Gaules, la préserva de ce naufrage, qui paraissait inévitable, et la fit heureusement aborder au port de Marseille ; là, ayant été reçue des habitants avec bienveillance, elle travailla quelque temps à leur conversion. Ensuite ella alla à Aix, A Avignon et aux autres lieux d’alentour, où elle s’employa de tout son pouvoir à éclairer des lumières de l’Evangile ces pays idolâtres et corrompus par les vices du paganisme. Il parut en ce temps, sur les bords du Rhône, aux environs de la ville d’Arles, un horrible dragon qui, étant moitié animal terrestre et moitié poisson, causait de grands maux sur la terre et dans la rivière ; car se cachant dans l’eau, il renversait les vaisseaux qui passaient, pour engloutir les passagers ; et, d’ailleurs, il faisait des courses dans la forêt voisine, où il égorgeait et dévorait tous les hommes qu’il recontrait.

Les habitants connaissant la vertu incomparable de Sainte Marthe, et le grand don des miracles qu’elle avait reçu du ciel, la supplièrent, avec larmes, de les délivrer de ce monstre, lui promettant que, si elle leur faisait cette grâce, ils croiraient tous en Jésus-Christ et embrasseraient la religion chrétienne. Marthe avait trop compassion pour leur misère et trop de zèle pour la gloire de son maître, pour leur refuser un secours qui, en les soulageant, pouvait contribuer si avantageusement à l’établisement du Christianisme. Elle se transporta donc dans le bois voisin, où elle trouva le dragon qui achevait de dévorer un homme. Elle fit aussitôt le signe de la croix vers lui et lui jeta de l’eau bénite ; et, par la vertu de ces deux actions, elle l’affaiblit tellement, qu’il n’eut plus le pouvoir de nuire à personne. Elle le lia comme un agneau avec sa ceinture, et l’amena au peuple, qui le tua à coups de pierres et de lances. On dit que le nom de Tarascon, que porte la ville qui est en cet endroit, lui a été donné à cause de ce dragon et en mémoire de ce prodige, parce que Tarasque, en provençal, signifie une chose horrible.

Cette étymologie n’est guère vraisemblable, puisque Strabon, qui est plus ancien que la prédication de l’Evangile, fait mention de cette ville sous le nom de Tarascon, dans les livres de sa Géographie. Ce qui est plus certain, c’est que Sainte Marthe choisit cette ville pour le lieu de sa retraite, et qu’elle y assembla une illustre compagnie de personnes de son sexe, avec lesquelles elle vécut dans une très grande austérité de vie et une sainteté admirable. Comme elle enseignait à Avignon la doctrine de la foi, un jeune homme, qui était au-delà du Rhône, ayant une extrême passion de l’entendre et n’ayant point de bateau pour passer, se hasarda de passer à la nage ; mais ses forces le trahissent, et il disparaît sous les eaux. Lelendemain, seulement, vers la neuvième heure du jour, des pêcheurs le retirent de leurs filets ; on porte ce corps inanimé dans la ville ; le peuple s’écrie qu’il faut l’amener à la sainte et lui demande ce nouveau miracle. ‘Si vous voyez ce jeune homme vivant et rendant téoignage à Jésus-Christ, croirez-vous vous-mêmes ? dit Marthe. La foule s’écrie : ‘Nous croirons que votre Sauveur est vraiment le Fils de Dieu, et Dieu lui-même qui vous a choisie pour être le ministre de sa parole’. Pleine de joie et de confiance dans les promesses de Jésus-Christ, Sainte Marthe se met à genoux et implore le Sauveur qui avait ressuscité son frère Lazare. La foule émue se prosterne contre terre, et toute cette ville crie vers le Seigneur ; alors Marthe se lève, s’avance vers le cadavre, et commandant à la mort : ‘Jeune homme’, dit-elle, ‘au nom de Notre-Seigneur Jésus-Christ, levez-vous et rendez témoignage des grandes choses que la bonté du Rédempteur a faites en votre faveur’, et le mort se redresse plein de force ; son âme vivante éclate dans ses yeux ; ses lèvres s’ouvrent pour remercier le Seigneur ; il proclame sa foi en Jésus-Christ, et demande le baptême. ‘Jésus-Christ est vraiment Dieu’, dit la foule transportée d’émotion et de joie, ‘et il n’y a pas d’autre Dieu’.

Marthe se soummettait à une vie de pénitence, dont l’histoire nous a conservé les détails. Elle marchait toujours nu-pieds, usage adopté par les chrétiens et même par les païens dans les cérémonies d’expiation, mais que Marthe conserva toute le reste de sa vie. Elle était vêtue de la laine la plus grossière, et portait, pour coiffure, une tiare blanche en poil de chaneau ; la tiare faisait partie du costume oriental, et paraît être cette espèce de turban avec lequel on a coutume de représenter les rois Mages. Elle fit, dans le voisinage de Tarascon, une retraite de sept années, vivant dans la pénitencela plus austère. Son lit était un faisceau se sarments de vigne ; son corps portait une ceinture de crins de cheval, remplie de nœuds, et un cilice qui lui déchirait les chairs. Les herbes et les fruits sauvages étaient sa seule nourriture : néanmoins, nous voyons que, dans son ermitage, elle trouvait encore le moyen d’exercer l’hospitalité avec les dons qui lui étaient offerts. Beaucoup de chrétiens s’étaient bientôt formés à la suite de ses prédications, et les fidèles venaient porter à sa retraite de nombreux dons qui étaient empoyés à exercer l’hospitalité envers les étrangers.

Les historiens font entendre que le renouvellement des provisions de la petite communauté se faisait aussi par des moyens miraculeux, et que jamais elle n’éprouva d’embarras à nourrir les fidèles qui accouraient dans sa solitude ; elle fut assurément un des premiers chrétiens  qui aient commencé cette vie de mendicité que le christianisme a toujours glorifiée, et que de nombreux fidèles ont partiquée depuis et pratiquent encore. Du reste, elle ne vivait pas seule dans cette solitude ; ses autres compagnes la partagaient ; toutes priaient ensemble et s’en allaient dans tous les lieux voisins prêcher Jésus-Christ ; aussi toutes les villes qui environnent Tarascon revendiquent-elles aujourd’hui Sainte Marthe pour leur apôtre. C’est pendant cette retraite, dans ce que les historiens du temps appellent le désert de Tarascon, qu’elle fit périr miraculeusement le monstre si célèbre dans l’histoire, sous le nom de Tarasque […].

Saint Maximin, qui était l’intermédiaire entre Madeleine et Marthe, instruisait, dit-on, celle-ci des merveilles accomplies par sa sœur, et la remplissait de joie. Un jour il quitta Aix poussé par une inspiration divine, pour visiter Marthe et s’entretenir avec elle ; il n’avait d’autre dessein que de se sanctifier par sa vue, et de rapporter dans la grotte de Madeleine sa joie et son édification. Mais Dieu le conduisit. Au même moment, Trophime, évêque d’Arles, et Eutrope, évêque d’Orange, partaient également pour Tarascon, animés du simple désir de voir la sainte ; ces trois évêques se trouvèrent ainsi réunis, par la main de Dieu, dans la maison de Sainte Marthe. Alors, d’une commune inspiration et accomplissant la mission pour laquelle Dieu les avait réunis à leur insu, ils consacrèrent comme église, ét dédièrent au Sauveur la maison de la Sainte. C’est ainsi que nous avons vu les Apôtres consacrer, comme église, les maisons de Marthe, Marie et Lazare, à Béthanie. C’était la seconde fois que Marthe voyait son habitation, sanctifiée par sa présence, devenir la maison de Dieu […].

Et cette mémorable journée ne s’acheva pas sans qu’un miracle signalé eût manifesté la présence de Jésus-Christ au milieu de ses amis. Les approvisionnements de la communauté n’étaient jamais bien abondants. Sainte Marthe ne se nourrissait que des herbes des champs, et n’avait à offrir à ses hôtes que des dons offerts par les fidèles. Il paraît que Dieu avait inspiré à d’autres la même pensée de la visiter, car l’historien nous dit ‘que beaucoup d’autres personnes se trouvaient parmi les convives, et que le vin vint à manquer’. La Sainte, connaissant la présence de Jésus, ordonne de puiser de l’eau au nom de Jésus-Christ, et le miracle de Cana fut renouvelé. ‘Les évêques en ayant goûté’, dit naïvement Raban Maur, s’aperçurent qu’elle avait été changée en un excellent vin’. Alors ils résolurent de consacrer, par une fête, le souvenir de ce miracle et de cette solennelle dédicace ; ils instituèrent donc cette fête du 17 décembre, que l’église a célébrée jusqu’en 1187.

Depuis, la fête de Sainte Marthe a été placée au 29 juillet. On peut regretter l’abandon de la solennité du 17 décembre, commémorative d’un éclatant miracle, et qui avait été célébrée pendant onze siècles ; mais quand on découvrit les reliques de Sainte Marthe, cachée pendant les ravages des Sarrasins, on rappela une tradition, un peu incertaine depuis, mais vivante au 12 ième siècle, qui fixait à cette date la mort de la sainte. Un grand émoi avait été jeté dans tout le pays, par la découverte de ce corps saint dont plusieurs parties étaient encore revêtues de leurs chairs. L’enthousiasme provoqua l’institution d’une nouvelle fête que les églises adoptèrent successivement ; néanmoins, l’église de Tarascon, fidèle à tous les souvenirs de l’apostolat de sa patronne, a continué à célébrer l’une et l’autre fête, et n’a pas oublié l’institution première […].

Une autre église, à qui cette mémoire devait être encore plus chère, a conservé cette fête du 17 décembre jusqu’à sa destruction. L’église de Béthanie, en célébrant la fête du 17 décembre, avait joint, dans cette même solennité, la mémoire du frère et des deux sœurs, et honorait, le même jour, Lazare, Marthe et Marie-Madeleine. Quand Marthe vit les évêques se séparer et reprendre le chemin de leurs diocèses, elle s’adressa à Maximin, et, pleine de la pensée de sa chère Madeleine, perdue pour elle depuis tant d’années, lui demanda d’être encore le messager de ses souvenirs auprès de sa sœur ; Marthe, au milieu des fatigues de son apostolat, n’avait oublié ni Béthanie ni Magdalum ; et son respect pour la retraite de Madeleine était toujours le grand sacrifice de sa vie ; aussi sentant, par une lumière divine, la fin de sa carrière approcher, elle pria Maximin d’obtenir de Madeleine une seule visite avant sa mort ; elle demandait à la voir une fois encore sur terre, à serrer encore une fois dans ses bras cette sœur, qui avait toujours été sa fille, et à lui dire un dernier adieu ; Marie envoya à sa sœur les plus touchants témoignages de son affection et lui promit de satisfaire son désir. Les évêques d’Aix, d’Arles et d’Orange ne furent pas les seuls à visiter Sainte Marthe ; le nom et les œuvres de cette sainte étaient connus au loin, et les compagnons de son voyage, après l’avoir quittée sur les rivages de la Méditerranée, recueillaient avidement tout ce qu’on en racontait.

Saint Georges et Saint Front se réunirent donc à Tarascon, pour revoir leur ancienne compagne, s’entretenir avec elle des jours passés, et s’édifier au spectacle d’une si grande sainteté. Sainte Marthe reçut avec joie ses anciens compagnons. Ils restèrent auprès d’elle jusqu’à ce qu’il fut possible de retourner dans leurs diocèses, où une violente persécution s’était elevée. Ce fut alors qu’elle fit à Saint Front un adieu solennel et lui dit ces mémorables paroles : ‘Evêque de Périgueux, sachez que l’an prochain je quitterai ce corps mortel et abandonnerai cette terre ; je supplie votre sainteté de venir m’ensevelir’. Le saint évêque le lui promit, comme Madeleine avait promis de visiter sa sœur : ‘Ma fille, lui dit-il, j’assisterai moi-même à vos obsèques, si Dieu le veut et que je vive’. Les évêques étant partis, la Sainte réunit autour d’elle les compagnes de sa retraite, et, leur annonçant solennellement la fin de son apostolat, les avertit que son trépas arriverait au bout d’un an. Notre-Seigneur, pour la purifier davantage et lui donner le moyen de mériter une couronne plus glorieuse, lui envoya une fièvre qui lui dura toute l’année. Elle se prépara durant ce temps à bien recevoir son divin Epoux et à paraître devant ses yeux ornée de toutes les vertus.

Pendant ce temps, Madeleine, délivrée de sa prison mortelle, était montée au ciel. Les historiens racontent que Jésus-Christ vint lui-même, accompagné des anges, enlever sa bein-aimée dans la demeure céleste. On dit qu’au même moment, il fut donné à Marthe de voir, de son lit de douleurs, les chœurs des anges conduisant au ciel l’âme de sa sœur, et que, pleine de foi et d’émotion à cette vue, elle s’écria : ‘Ma chère sœur, pourquoi ne m’avez-vous pas visitée avant ma mort, comme vous m’en aviez fait la promesse ? N’oubliez pas celle à qui votre mémoire est si chère’. Cette apparition est également rapportée par Vincent de Beauvais, Pierre de Natalibus, et autres. Les compagnes de son apostolat, pleines d’émotion à la vue de ce grand miracle, se réunirent autour d’elle pour ne plus la quitter, et les fidèles accoururent de toute part autour du lit de la Sainte, dans l’attente des prodiges qui devaient signaler l’arrivée au ciel de l’hôtesse de Jésus-Christ. Desmultitudes se réunissaient autour de sa demeure ; des tentes étaient dressées dans la campagne, des feux allumés de tous côtés, et la foule anxieuse regardait le ciel, attandant les légions d’anges qui devaient descendre pour recevoir l’âme bienheureuse de leur grande sainte.

La tradition des miracles qui accompagnèrent la mort de Sainte Marthe reçoit une grande autorité, de cette circonstance, de la réunion de tout un peuple autour de son lit de mort ; les prodiges que les historiens des premiers siècles nous racontent, ont donc eu pour témoins non pas trois ou quatre fidèles privilégiés, mais tout un peuple. Les détails qui nous sont donnés sont tellement précis, qu’on n’endoit omettre aucun ; les fidèles campés autour de cette couche funèbre se remplaçaient auprès de la Sainte ; et ce n’était pas seulement les vierges ses compagnes qui avaient la charge de la veiller ; mais plusieurs y étaient admis, car l’histoire raconte que le soir du septième jour qui suivit l’apparition de l’âme de Madeleine, tous ceux qui la veillaient se trouvant pris par le sommeil, s’endormirent un instant ; ce soir-là, Marthe avait fait allumer sept flambeaux de cire et trois lampes ; ce nombre, que la tradition nous a conservé, avait-il quelque chose de symbolique ? Et s’il n’était que l’effet du hazard, pourquoi la mémoire des populations nous l’aurait-elle si soigneusement transmis ? Alors un grand tourbillon d vent s’éleva sur la maison, comme au jour de la Pentecôte ; mais ce n’était pas Dieu qui arrivait, c’était le démon qui éteignait toutes les lumières ; la sainte, éclairée par l’intelligence divine, le comprit, et s’amant du signe de la croix, combatti l’ennemi par la prière, après quoi, réveillant ses gardiens endormis, elle les pria de rallumer les cierges et les lampes ; comme ils étaient sortis pour chercher des lumières, une clarté surnaturelle descendit du ciel, la chambre fut illuminée subitement, et Madeleine, Marie-Madeleine elle-même, apparaissait auprès de sa sœur et rallumant miraculeusement ce que le démon avait éteint, s’approcha de Marthe et lui dit : ‘Chère sœur, je vous visite avant votre mort, comme vous me l’avez fait demander par le saint pontife Maximin ; mais voici le Sauveur lui-même qui vient vous rappeler de cette vallée de misère ; venez donc et ne tardez pas’.