Quand Saint Jean Damascène pratiquait le dialogue islamo-chrétien en réfutant le Coran

 

- Vie et oeuvre de Saint Jean Damascène (652-750)

Il s'appelait Mansûr en arabe.
Son grand-père Mansûr b. Sardjûn négocia avec Khâlid b. al-Wâlid la reddition de Damas (635), puis fut ministre des finances dans le gouvernement du calife Mu'âwiya I (661-680). Son fils Ibn Mansûr, père de Saint Jean Damascène, lui succéda à ce poste.
Saint Jean Damascène était de formation grecque et arabe. Après la mort de son père (entre 691 et 695), Jean devint secrétaire de l'émir de la ville. Il avait en charge probablement aussi les affaires financières.
Après 726, Jean démissionne de son poste pour mener la vie contemplative au monastère saint Sabas.

Il est considéré comme le dernier Père de l'Eglise. Son principal ouvrage est la Fontaine de la Science (vers 743) qui comprend trois parties :

les Capita philosophica ou dialectica
De Haeresibus
De Fide Orthodoxa.

Les chapitres 1 à 20 du De Haresibus traitent des mouvements philosophiques et religieux d'avant l'ère chrétienne.

Les 60 chapitres suivants traitent de 60 autres hérésies, puis encore 20 autres dans les chap. 81-100.

La seule contribution originale est les trois derniers chapitres qui traitent de l'islam, de l'iconoclasme et de la secte des Aposchites.

© Ralph Stehly, Professeur d'histoire des religions, Université Marc Bloch, Strasbourg

 

- Quand Saint Jean Damascène pratiquait le dialogue islamo-chrétien en réfutant le Coran

Docteur de l'Eglise, saint Jean Damascène fut un témoin oculaire du passage de la culture chrétienne à celle de l'islam en Syrie au VIIIe siècle. Dans son classement Des Hérésies, il consacre le chapitre 100 à l'islam, qu'il tient pour une hérésie née au sein d'une communauté déjà hérétique, celle des Saracènes (qui donnera ensuite le terme "Sarrasins") :

"Il y a également chez les Ismaélites [ou Saracènes] une superstition trompeuse qui est toujours agissante, et qui sert de précurseur à l’Antéchrist (...). Les Saracènes étaient idolâtres, et vénéraient l'étoile du matin ainsi qu'Aphrodite. Ce nom dans leur langue signifie Majestueux (Habar) c'est ainsi que jusqu’au temps d’Héraclius, ils étaient assurément idolâtres.

A partir de cette époque, un faux prophète survint au milieu d’eux ; il s'appelait Mameth. Il a entendu quelquefois l’Ancien et le Nouveau Testament, et est censé avoir rencontré un moine arien, par la suite. Finalement il créera lui-même sa propre hérésie.

Puis déçu, il fit croire au peuple qu'il était un "craignant Dieu", et fit propager la rumeur qu'un écrit saint lui avait été apporté du ciel. Il mit par écrit des sentences, qu'on ne peut que railler, dans son livre et le leur donna pour qu’ils y obéissent."

Saint Jean Damascène raconte également la façon dont il pratique, sous domination musulmane donc, ce que l'on appellerait aujourd'hui "le dialogue interreligieux". Sans concession. Ainsi, quand il demande aux Saracènes de prouver que Mahomet (ou Mahmet) est bien prophète :

"(...) nous leur avons dit que Moïse reçut la Loi au Mont Sinaï à la vue de tout le peuple quand Dieu apparut dans la nuée et dans le feu, dans les ténèbres et dans la tempête; ils sont étonnés de ce que tous les prophètes, en commençant par Moïse, puis ceux qui le suivirent ont prédit la venue du Christ, également le fait que le Christ est Dieu et que le Fils de Dieu viendra en s’incarnant, qu'il sera crucifié, qu’il mourra et qu'il sera le juge des vivants et des morts. Et alors quand nous demandons : "Comment se fait-il que votre prophète ne soit pas venu de cette manière, en ayant d'autres personnes qui témoignent à son sujet ? Car contrairement à Moïse à qui Dieu a donné la Loi, pendant que le peuple regardait et que la montagne était enfumée, Dieu n'a pas donné à votre prophète l'écrit en votre présence. Autrement vous aussi pourriez en avoir l'assurance". Ils répondent que Dieu fait ce qui lui plaît. Ceci, disons-nous, nous le savons également; mais comment l'écrit est-il descendu vers votre prophète ? Voilà ce que nous demandons.

Et à eux de répondre que, pendant qu'il était endormi, l'écrit saint est descendu sur lui (...).

Quant à nouveau nous leur demandons : "Comment se fait-il que bien que, dans vos écrits saints, il vous a commandé de ne rien faire ni de recevoir quoi que ce soit, sans la présence de témoins, vous ne lui ayez pas demandé: " Prouve d’abord avec l’appui de témoins que tu es un prophète et que tu es venu de la part de Dieu, et quel écrit saint témoigne en ta faveur ? ", ils restent silencieux, car ils sont honteux.

Puisque vous n’avez pas l'autorisation de vous marier sans témoins, ni d’acheter quoi que ce soit, ni d’acquérir aucune propriété, (vous n'avez même pas le droit de prendre un âne, ou tout autre animal, sans témoins), ainsi donc vous avez des femmes, des propriétés, des ânes et toute autre chose, en présence de témoins; et donc uniquement votre foi et vos écrits saints vous les acceptez sans témoins.
Cela provient du fait que celui qui vous a donné les écrits, ne détient son autorité de nulle part. De plus il n'y a personne de connu qui ait témoigné à l'avance à son sujet. Il faut ajouter que le prophète reçut cela, alors qu’il dormait".

Chapitre 100 complet ici.